Les cuprates, découverts en 1986 par Georg Bednorz et Alex Müller sont les « rois » des nouveaux supraconducteurs. Ce sont, à l’heure actuelle, ceux qui présentent de la supraconductivité aux plus hautes températures, soit -135°C ou 138 K. Ce sont les seuls matériaux qui sont supraconducteurs à la température de l’azote liquide : toutes les vidéos de ce site utilisent des cuprates, qu’ont appelle souvent « supraconducteurs à haute température critique ».
Pourtant, l’origine de leur supraconductivité n’est pas encore comprise et reste une des énigmes les plus importantes et difficiles de la physique moderne. Leur composition et leur structure est pourtant relativement simple : il s’agit de mille-feuilles où des couches d’atomes s’empilent les unes sur les autres. Dans tous les cuprates, on retrouve en particulier des couches de cuivre et d’oxygène à la structure en carré. Le nombre d’électrons dans ces couches peut y être modifié en oxydant le matériau ou en modifiant sa composition chimique ; on parle alors de « dopage ».
Les physiciens et les chimistes aiment bien montrer ce que deviennent ces oxydes en fonction de leur dopage en utilisant ce qu’ils appellent un « diagramme de phase ». À basse température, le même composé y apparaît isolant et magnétiquement ordonné (la zone jaune), mais quand on modifie seulement de quelques pourcents le nombre d’électrons, il devient le meilleur des supraconducteurs !
Les physiciens espéraient qu’en étudiant le comportement de ce matériau à haute température, ils pourraient mieux anticiper pourquoi il devient supraconducteur. C’est là qu’une autre bizarrerie de ces oxydes est apparue : le mouvement de leurs électrons dans les plans de cuivre et d’oxygène n’a rien à voir avec celui dans bout de cuivre métallique. Au lieu de pouvoir se déplacer librement, les électrons s'y déplacent difficilement, s'évitant les uns les autres, car ils se repoussent électriquement et sont confinés aux arrêtes des carrés qui forment ces plans : on parle alors d’électrons fortement corrélés. C'est justement dans ce mouvement compliqué d'électrons corrélés qu'il faut donc peut-être chercher l'origine de la meilleure supraconductivité observée à ce jour !
Plus de vingt ans après leur découverte, ces composés continuent de fasciner et surprendre les physiciens par leurs propriétés tout à fait originales. Ils ont constitué un véritable laboratoire d’idées et ont forcé les scientifiques à développer de nouveaux outils théoriques et de nouvelles expériences toujours plus sophistiquées et novatrices pour mieux les comprendre, menant à un véritablement renouveau de la physique des solides et des oxydes en particulier. À quand la solution ?